Les graines de Cardère

Cette superbe fleur était cultivée autrefois pour les besoins de l’industrie textile, avant de disparaître avec elle…

Disparaître ?… Non ! Car la Hulotte, tombant sur les toutes dernières graines, les a semées et multipliées pour ses lecteurs, qui aujourd’hui la cultivent dans toute la France.

Vous aussi, aujourd’hui, vous allez pouvoir adopter chez vous cette belle oubliée. Tante Hulotte vous enverra un sachet de graines de Cardère cultivée, la petite ouvrière des fabriques, accompagné de tous les conseils utiles pour réussir à votre tour la culture passionnante de cette fleur, amoureuse des papillons et des chardonnerets, aussi belle en été qu’en hiver, et pas envahissante pour un sou.

« Et dire que moi, la Cardère cultivée, si célèbre aux siècles passés (à certaines époques, je rapportais plus que le blé !) j’ai failli disparaître à jamais. Cela faisait tant de siècles que l’on se servait de mes épines recourbées, merveilleusement fermes et souples, pour peigner en douceur les tissus de draps fins : j’étais sûre que cela durerait éternellement !

Et puis les ignobles brosses métalliques sont arrivées. Stupeur ! L’Homme s’est contenté de leur travail approximatif et m’a laissé tomber. Pour économiser trois sous ! Il avait perdu le goût des belles choses…

En 1989, il ne restait plus de ma noble famille qu’un vieux sac de graines, oublié dans le tiroir d’un négociant de Tarascon. La Hulotte m’a tirée de là. Ayant miraculeusement récupéré ce trésor, elle l’a semé. La plupart des graines avaient perdu leur pouvoir germinatif, mais certaines ont germé. L’oiseau de nuit les a multipliées ; puis a distribué la semence obtenue à tous ceux de ses lecteurs qui étaient volontaires pour cultiver chez eux, dans leur cour ou leur jardin, cette petite miraculée.

Plus de douze mille îlots conservatoires sont ainsi sortis de terre en quelques années. Chaque sauveteur a scrupuleusement reversé la dîme à la Hulotte : quelques graines issues de sa récolte – que la brave bête s’est empressée de redistribuer aussitôt gratuitement à d’autres lecteurs. »