A la page 35 de ton n° 75, tu dis qu’Emys, le nom savant de la Cistude, veut dire « souris ». Je me demande si tu ne fais pas une petite confusion entre deux mots grecs « μυς » (= latin mus) qui veut dire « souris » et « εμυς » (= latin emys)

qui signifie « tortue d’eau douce ». Ce dernier mot est dans l’Histoire des Animaux du grand Aristote.

Camille M. (75) - [avril 1998]


Passionné d’étymologie naturaliste (et auteur de livres sur le sujet), je voudrais vous faire part d’une précision.
Il est impossible, je l’ai vérifié aux meilleures sources disponibles, de faire dériver le nom de genre Emys du mot grec « Mus ». Il existe par contre en grec classique un mot Emus (prononcer « émusse »), qui désigne… une tortue d’eau. Aristote l’emploie (à trois reprises, au masculin et au féminin) pour désigner cet animal.
Emus et Emys sont deux formes du même mot, car le u (ou upsilon) est devenu notre « i grec = y». Selon le dictionnaire d’étymologie de la langue grecque classique (E. Boisacq, 1938), Emus viendrait d’une racine « uem » qui signifierait cracher (allusion aux bulles d’air que l’animal émet sous l’eau), alors que Mus dériverait du sanscrit « mûh », nom de la souris.
Voici pour la petite histoire une traduction des affirmations d’Aristote sur la Tortue d’eau dans son « Histoire des animaux » :

Chapitre. 5-33-3 : « La tortue de rivière sort de l’eau pour pondre : elle creuse un trou qui a la forme d’un tonneau, elle y pond ses œufs et les abandonne. Après les avoir laissés ainsi moins de 30 jours, elle les déterre, les fait éclore rapidement et emmène aussitôt ses petits à l’eau. »
Chapitre 8-17-6 : « La tortue terrestre fait partie des animaux à écailles ainsi que la tortue de rivière ».

Pierre Cabard (37)


    Un grand merci pour ces précisions. Et pan sur le bec de La Hulotte, qui s’est stupidement laissée séduire par l’explication « Emus vient de Mus (la souris) » avancée par certains spécialistes des tortues. La prochaine fois, elle ne manquera pas de consulter les latinistes ou hellénistes distingués qui figurent parmi ses savants lecteurs.

Pierre Cabard a écrit, en collaboration avec B. Chauvet, une « étymologie des noms d’oiseaux » origine
et sens des noms d’oiseaux d’Europe (noms scientifiques, noms français), chez Eveil Editeur.